Alors que nous sommes arrivés à
échéance du grand débat lancé afin chacun puisse s’exprimer sur des sujets
sociétaux important. Il me semble indispensable de recenser les opinions
concernant l’inclusion dont on nous parle tant…
Qui de mieux qu’un artiste
impliqué et un papa concerné pour exprimer son ressenti face à ce qui pourrait
être pris pour une promesse politique entre autres ?
Selon-vous, que devrait signifier l’inclusion ?
Le mot
me fait sourire.
C’est un
peu comme l’intégration, mot à la mode fut une époque pour les personnes
d’origine immigrée.
J’avais
d’ailleurs des potes humoristes qui avaient monté un duo s’appelant « les
intégrés ». Saïd Serrari et Rachid Kallouche qui devaient sans cesse se
justifier d’être nés en France, montrer leurs papiers, etc... suite à la loi
Pasqua. Saïd a tourné dans pas mal de films et Rachid, désormais Jean-Rachid, a
épousé la fille d’un certain Charles Aznavour … et n’est autre que le
producteur de Grand Corps Malade.
Ils se
sont plutôt bien intégrés, non ?
Donc
l’inclusion, comment ne pas être pour … puisque le contraire, l’exclusion a
priori, on en est rarement fan.
Mais que
signifie ce mot, puisque c’est la question, quelles sont les limites de
l’inclusion, celles du quotidien d’une personne porteuse de handicap et celles
qu’on ne veut pas nous dire ?
Inclusion « bisounours » où tout
serait possible, où tout le monde pourrait accéder à tout, à tout
instant ?
Ou inclusion « réelle », souvent bien partielle et
d’autant plus réduite que le handicap est lourd ?
En tant que parent d’enfant avec autisme, que
pensez-vous de l’inclusion tant évoqué pour les enfants porteurs de
handicap ?
Je
prends toute inclusion, bien sûr. Mais j’ai bien peur que quelques milliards
nous manquent. Pour l’autisme, une réelle inclusion nécessitera d’autant plus
de pépettes que le degré est important – et n’oublions pas que 30 à 40% des
personnes avec autisme ont une déficience intellectuelle – ce qui ne veut pas
dire « manque d’intelligence » - et ces chiffres étaient encore rappelés
lors de la journée organisée sur la recherche à Pasteur, le 30 mars dernier.
Ainsi,
pour mon grand Gabin, je le dis souvent, une société vraiment inclusive nécessitera une ville sans voiture ou
avec voitures s’immobilisant net – Gabin n’attend pas forcément aux feux – une
montagne sans relief – il y a déjà 3 étés, on part pour une petite ballade au
lac de la Plagne, Gabin lui partait en courant faire le tour du Mont Blanc - …
oui une montagne sans relief, une mer sans marées et surtout une balise GPS
pour localiser Gabin à tout instant !
Car le degré d’inclusion dépend bien sûr du niveau d’autonomie de chaque
enfant ou personne.
Les opinions sur l’inclusion divergent : promesse / communication politique ?
Quel est votre ressenti ?
Dès sa prise de fonction au secrétariat d’État en charge du handicap, Sophie
Cluzel a dit vouloir « accompagner autant que possible le déploiement d'une
réponse accompagnée pour tous ».
D’un point de vue sémantique, on notera ce joli mot clé
« accompagner » mais le « autant que possible » n’échappera
à personne.
De même, il y a quelques mois sur France 5, Madame Cluzel a répété à
l’envie que « l’autonomie n’est
qu’une question de bon accompagnement ».
Ok, banco, triple banco pour l’accompagnement !
… mais c’est où, quand, comment ? J’en déduis donc que mon fils sera très
prochainement 100% autonome et 100% « inclus » dans la vie de la
té-ci.
Moi qui m’inquiétais de savoir ce qu’il deviendrait le jour où je ne
serai plus là, je sais qu’il sera donc « autant
autonome » que moi d’ici peu. Il fera ses courses – prévoir un ou deux
accompagnants en forme, Gabin refuse très régulièrement d’entrer dans tout
nouveau magasin et je ne parlerai même pas des supermarchés.
Il aura bien sûr un emploi … bon, actuellement, à part l’expérience
menée à Andros, qui nécessiterait que Gabin ait moins de troubles du
comportement, je ne vois pas à quelle porte je pourrais frapper … pardon, à
laquelle il pourrait frapper puisqu’ il sera autonome, bien sûr.
Bon, malgré une demande formulée dans le Huffington Post il y a déjà
deux ans, personne n’a encore trouvé un poste à Gabin, mon champion à rollers.
Seul le patron d’Andros m’a dit qu’il l’aiderait, Gabin livreur de Pom
Potes à rollers, pourquoi pas ? Eh mince, Pom Potes, c’est Materne …
Pour vous, quelles seraient les personnes en mesure de
vraiment faire en sorte que nous allions vers une société inclusive ?
Les
personnes ? Euh, c’est un peu « Aide-toi, le ciel t’aidera » …
Quelles mesures indispensables faudrait-il mettre en
place pour que nous puissions arriver à un système inclusif ?
Pour les
établissements ou l’habitat, être sur un modèle suédois, pas plus de 6
personnes par centre.
Pour
l’emploi … que notre ministre de tutelle garantisse tout d’abord à chaque
personne porteuse de handicap une autonomie non virtuelle … et on en reparle
dans quelques siècles.
Mais je
suis un brin pessimiste, on va rebâtir Notre-Dame en 5 ans donc tout est
possible ! … la « full inclusion », on l’aura peut-être même
avant la nouvelle flèche de Notre-Dame.
Et si on
lançait également un concours de « l’inclusion miracle », ce serait
sympathique, non ?
L’autisme est un sujet épineux, sociétal, presque
politique, défiant avec prouesse et méconnaissance de nombreux avis. Pourtant,
ce terme est aujourd’hui un fourre-tout dans lequel professionnels, organismes
médico-sociaux, justice et politiciens s’acharnent à en faire un enjeu de
grande envergure.
Quel est votre sentiment ? Avez-vous la sensation qu’il
est employé à bon escient ?
On devrait
définitivement employer le terme « avec autisme » plutôt que personne
« autiste ».
Je ne
connais pas d’enfant ou adulte autiste sans d’autres « troubles » -
je n’aime pas le mot mais dans TSA il y a A pour Autisme mais aussi T pour
troubles - tels que la dyspraxie ou l’épilepsie.
Le
simple terme « autiste » permet à certains de s’en emparer comme un
trophée ou une simple différence – voire une marque déposée - généralisant leur
propre autisme ou celui de leur enfant.
Bien
souvent, ce sont les mêmes personnes qui contestent ou marginalisent la
déficience intellectuelle dans l’autisme. On veut nous vendre de l’autisme 100%
intelligent, 100% glamour, de l’autisme « zéro défaut », de l’autisme
« tout est beau » …
C’est
étrange, moi qui sillonne les routes de France depuis quelques années, ce n’est
pas du tout le retour que me font les parents et personnes concernées, y
compris chez les autistes Asperger.
D’ailleurs,
à Pasteur, une étude internationale d’envergure a donné une conclusion qui ne
dérangera que ceux que la science dérange :
« Il
n’y a pas une caractéristique au niveau cognitif, neurofonctionnel,
neurobiologique, neurochimique, ou encore génétique qui soit partagée par
toutes les personnes avec autisme »
Aucune
personne « avec autisme » ne peut donc définir l’autisme d’une autre
personne et je ne pourrais d’ailleurs même pas vous définir l’autisme de Gabin,
je ne parle que pour le défendre … mais j’ai découvert récemment que cela
pouvait en déranger certains sous prétexte que je n’étais moi-même « pas
autiste ». À voir …
Et si je
n’avais jamais parlé pour Gabin, il n’aurait même pas fait une semaine d’école
et « le bal des pompiers », mon spectacle sur Gabin, ne serait jamais
né.
C’est
alors oublier que ce spectacle, justement, milite pour la fameuse inclusion.
Mais ce qui est vrai pour l’autisme est également vrai pour de nombreux
handicaps. On commence à nous vendre du « handicap sans handicap » à
tous les rayons … c’est sans doute plus vendeur, il est vrai que le marché de
l’édition a besoin de se relancer.
Bon,
moi, du handicap et de l’autisme, il y en a non seulement dans toutes les pages
de « Gabin sans limites » mais, surtout, à chaque seconde de la vie
bien rock ‘n’ roll de mon bel ado.
Récemment,
à Avignon, lors d’une journée organisée par l’association TEDAI 84, à la vue
d’une photo de Gabin sur l’écran, j’ai entendu, du public, un superbe : « eh
mais c’est Mick Jagger ! ».
Oui,
l’inclusion, ce sera vraiment rock ‘n’ roll !
Propos recueillis par Manuela SEGUINOT
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RépondreSupprimerMoi aussi
RépondreSupprimerEh bien du coup, je partage. enfin j'essaie. Moi aussi, je suis contente de savoir que mon fils sera 100% autonome. Et une ville sans voiture, ça m'arrange aussi, car s'il a décidé d'aller au café tout de suite, c'est pas une voiture qui va l'arrêter.
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