mardi 17 septembre 2019

Entretien avec Anne JUVANTENY : Accueillir un enfant différent en famille





1/ Vous êtes l’auteure de l’ouvrage « Accueillir un enfant différent en famille », pouvez-vous nous le présenter ?

Ce livre évoque tous les aspects de la vie de famille quand on a un enfant porteur de handicap : de l’annonce du handicap à sa prise en compte dans la vie quotidienne en passant par les impacts sur la vie de couple, la fratrie, les relations avec la famille d’origine (les grands parents, les oncles, tantes et cousins). 

Je l’ai écrit en m’appuyant sur mon histoire de mère d’une enfant de 12 ans porteuse de handicap et sur le témoignage d’une vingtaine de familles concernées elles aussi par cette question.


2/ On peut lire qu’il y a différentes étapes cruciales dans l’acceptation du handicap de son enfant, pourquoi selon-vous ?

Comme je le dis dans mon livre, le handicap d’un enfant est un trauma pour toute la famille. Et comme tous les traumas il nécessite des adaptations fortes. Ces adaptations nous amènent à faire le deuil, non pas de notre enfant, mais de la vie telle qu’elle existait ou qu’on l’imaginait avant l’arrivée fracassante du handicap. 

Ce deuil suit les étapes, bien connues en psychologie du refus, de l’adaptation puis de l’acceptation pour enfin arriver à ce qu’on appelle l’intégration, qui marque la possibilité du retour à l’apaisement. L’acceptation en est la clé et, hélas, tout le monde ne parvient pas à y accéder. C’est un travail à conduire par les familles et qui prend souvent de années.





3/ Dès lors qu’il y a fratrie, on pourrait penser que les autres vont être mis de côté du fait du handicap de leur frère ou sœur. Est-ce un préjugé ou une réalité « naturelle » / « maladroite » ?

Naturellement, les frères et sœurs sont confrontés à la réalité du handicap. Dans cette réalité il y a la place énorme que vient prendre le handicap : beaucoup de temps passé à voir des professionnels, remplir des papiers, souffrir aussi. 

Cela conduit inévitablement à moins de place pour eux et aussi souvent plus de responsabilités. Ils aident les parents souvent. C’est inévitable. Cela ne veut pas dire que c’est seulement une expérience difficile.

Si les parents sont vigilants et arrivent à accorder de l’attention aux autres enfants et/ou à faire en sorte qu’ils aient un espace pour eux …un espace où ils peuvent vivre aussi l’insouciance de leur enfance … ou les problèmes de leur adolescence J alors cela peut au contraire devenir une richesse. 

Côtoyer le handicap c’est aussi vivre l’ouverture à la différence, se découvrir plus fort et plus humain, plus capable de se centrer sur l’essentiel. Ce sont des leçons de vie essentielles dont je parle dans mon livre. Je suis allée à la rencontre de frères et sœurs qui ont su faire de cette épreuve une richesse pour qu’ils en témoignent.


4/ Certains couples ne résistent pas du fait de l’ampleur du handicap de leur enfant : stress, pression, fatigue, combat permanent, isolement… Quels conseils auriez-vous pour tenter de ne pas arriver à cette extrémité de souffrance ?

80% des couples se séparent quand ils ont un enfant différent … La première clé est d’accepter que l’autre est différent et va traverser ce trauma à sa manière. C’est un cheminement solitaire. Il faut avoir la patience d’attendre et l’envie de se retrouver un jour. 

Pour cela il faut beaucoup de bienveillance et de communication dans le couple. Parfois de l’aide est nécessaire … Mon conseil, comme pour tous les couples, est de prendre du temps aussi pour le couple : le temps d’échanger, de se retrouver pas seulement en tant que parents mais en tant qu’amoureux.


5/ Pas facile de trouver sa place pour la fratrie, on se sent délaissé, exclus… Mettre des mots sur des maux, pas facile pour des enfants. Que faudrait-il faire pour prévenir d’éventuelles difficultés ?

Il faut libérer la parole des enfants : qu’ils puissent dire leur ras-le-bol du handicap et même de leur frère ou sœur au même titre que s’il était « normal ». 

L’humour peut permettre de le faire. Par exemple avec ma fille aînée quand nous sommes fatiguées de la place que prend le handicap dans nos vies, des crises que fait ma fille nous imaginons le meilleur moyen de se débarrasser d’elle. 

On en rit ensemble et cela nous permet de relâcher la pression. Dire soi-même en tant que parent sa fatigue est une manière d’autoriser l’enfant à faire de même et ne pas le laisser s’enfoncer dans la culpabilité.


6/ Quelle seraient les mises en garde que vous pourriez conseiller aux familles pour ne pas sombrer ?

S’entourer des bonnes personnes est capital : autant pour la prise en charge de notre enfant que pour nous soutenir dans les moments difficiles ou simplement nous apporter de la joie et de l’insouciance. Pas besoin pour cela de beaucoup de monde : une poignée de personnes aimantes est suffisante. 

Les associations de parents font aussi un formidable travail d’écoute et de soutien. Même les réseaux sociaux avec les groupes fermés sur les thèmes du handicap font un beau travail pour cela.

Enfin il faut communiquer en famille, avec les amis et même au-delà pour faire connaitre le handicap et surtout développer l’inclusion. Car le regard des autres ou leur indifférence sont une double peine pour les familles qui ont déjà du mal à surmonter la situation. 

Œuvrer pour un monde inclusif c’est aider les familles à mieux vivre le handicap et tout le monde à mieux accepter la différence et ses richesses.


7/ Il est souvent très difficile aux familles de demander de l’aide ou de dire que l’on est en souffrance. Pourquoi ?

Les familles sont souvent débordées aussi bien émotionnellement que sur le plan pratique. Il y a beaucoup de démarches à faire et de rendez-vous chez les spécialistes pour accompagner l’enfant donc peu de temps pour se poser. Souvent cette suractivité permet aussi de ne pas trop s’appesantir sur sa souffrance et permet de « tenir ». 

Demander de l’aide demande beaucoup de courage : celui de partager notre détresse. On a peur d’être mal accueilli, d’embêter les autres, de leur faire peur, de ne plus être identifié.e que comme la maman/le papa qui a un enfant handicapé. 

Le sentiment aussi que personne ne peut nous comprendre nous empêche de parler. Souvent les familles se tournent vers d’autres familles qui vivent la même chose : la communication est plus simple et le soutien souvent plus efficace.


8/ Quel message souhaitez-vous faire passer à travers votre livre ? A qui s’adresse-t-il ?

Personne ne souhaite avoir un enfant différent et cela reste une expérience éprouvante qui nous change pour toujours. Le handicap vient compromettre beaucoup de nos rêves et projets. 

Pourtant la vie peut reprendre son cours et avec elle la possibilité du bonheur. Il va falloir aller chercher des ressources au plus profond de nous-mêmes pour y parvenir mais c’est possible. 

La patience, le courage est surtout l’amour peuvent nous permettre de transformer cette épreuve en une occasion de grandir en humanité et de vivre une vie plus riche.

Propos recueillis par Manuela SEGUINOT


dimanche 8 septembre 2019

Quand l’utopie rime avec la poésie




1/ On peut lire que votre parcours a été long et sinueux, que vous n’avez jamais lâché prise et qu’il vous est indispensable d’avancer ainsi. Pouvez-vous nous parler de vous en quelques lignes ?

Je ne comprends pas bien la question. Le lâcher prise est un concept en soi, parfois un but à atteindre (et je crois y arriver périodiquement, même si ma vie actuelle, depuis le lancement du projet "Kalune", ne laisse guère de place pour une vie privée digne de ce nom).
Sinon, je suis un humain, né en France dans les années 80, donc faisant partie des 1 ou 2 % des plus privilégiés sur notre jolie planète. Et la vie est m'a appris qu'elle ne tenait à rien, et qu'il fallait tout faire pour la préserver. Je suis donc aujourd'hui conscient que nous sommes la dernière génération avant l'effondrement imminent de notre civilisation, et également les dernier(e)s à pouvoir agir concrètement pour tenter d'adoucir l'impact de cette chute à venir (et déjà en cours sur plusieurs endroits du globe).


2/ Vous dénoncez en chanson, avec force et conviction, de nombreuses causes. Vos mots sont percutants, touchants et émouvants à la fois. Comment en êtes-vous venu à l’écriture de textes musicaux ?

J'écris depuis que j'ai lâge de tenir un stylo. Dans les années 90, alors que j'étais adolescent, mes poésies sont devenues des raps, et c'"est ainisi que j'ai "basculé" dans l'écriture de textes musicaux.

3/ Vous avez fait de votre différence une force incroyable. On peut aisément ressentir à travers vos textes l’énergie, la volonté qui vous anime face aux regards portés sur des sujets de grande envergure comme l’écologie. Quelles sont vos sources d’inspirations ?

Mes inspiratioons sont multiples et diverses, mais l'injustice est sans doute la source de mon besoin d'expression. Aujourd'hui, la première victime d'injustice étant la nature, il va de soi que je tente humblement de prendre sa défense. J'admire les personnes qui se sacrifient pour ce combat nécessaire, les militants, les résistants, et celles et ceux qui n'ont pas peur d'abandonner leur confort pour tourner définitivement la page du capitalisme, et celle de la civilisation industrielle.

4/ Une chanson émerge de votre vécut en tant que personne avec handicap : « Toute ma différence ». De la souffrance, aux changements radicaux d’une vie en passant par les regards portés sur le handicap, les étapes les plus difficiles y sont évoquées avec une rage impressionnante. Pourtant, ce n’est pas un sujet que vous évoquez souvent, pourquoi ?

Cette chanson a plus de dix ans. Aujourd'hui, je ne souhaite plus spécialement parler de ça, car il y a des milliers de sujets tellement plus importants. Je défends un modèle social tout autre, dans l'entraide, dans le partage, en lien avec la terre et dans le respect du vivant. La question du handicap se pose aujourd'hui dans un contexte, qui est celui de notre société. Et puisque je suis fondamentalement contre le maintient de ce contexte, je ne souhaite pas me battre pour l'acquisition de mini avancées sociales qui ne changeraient rien au problème de fond. Je pense qu'il faut changer profondément et radicalement notre modèle social, et dans la projection d'un autre Monde, et seulement dans ce cas précis, je me sens absolument ouvert et prêt à débattre du sujet.

5/ Ne pensez-vous pas qu’il y a encore beaucoup à faire, à dire, sur ce sujet qui met de plus en plus de personnes en retrait et en grande souffrance dès le plus jeune âge?

Encore une fois, je suis désolé.... Mais je n'ai pas ce rapport là au handicap. Bien sûr qu'il y aurait beaucoup à en dire, et à faire.... Tout comme il y a beaucoup faire pour les enfants qui bossent en Chine ou au Bengladesh pour notre confort, beaucoup à faire pour l'accueil des réfugiés, pour les femmes battues et même les droits des femmes en général, et contre les millions d'injustices qui forment le socle garant du capitalisme patriarcal. Les combats à mener sont multiples, et je ne pense pas que le fait d'être en fauteuil roulant soit une raison suffisante pour parler de ça, au contraire. Je pense qu'on aurait tout à gagner à élargir nos combats, et à se battre pour l'autre, et non pour soi et les siens.

6/ J’ai découvert avec plaisir votre chanson « La machine à fabriquer des nuages » que vous interprétez en duo avec une jeune fille. Vous y abordez de nombreux sujets sociétaux, pourquoi avoir choisi la parole d’une enfant ?

C'est étrange, c'est le deuxieme morceau dont vous me parlez, et celui-ci aussi a une dizaine d'années. J'avais envie, sur un titre, de toucher les enfants. Cette envie est toujours présente, et je pense même à faire un album pour enfants, autour des plantes , de la terre, des insectes, en bref des sources de la vie, pour les ramener à ce qui est essentiel, selon moi (et accessoirement pour faire le travail que l'éducation nationale ne fait pas).

7/ L’inclusion sous toutes ses formes est une parfaite utopie faisant trembler les principaux concernés qui continuent de souffrir en silence. Que ce soit pour les enfants, les jeunes en devenir ou les adultes, le combat est aussi cruel pour les uns que pour les autres. Quel regard portez-vous sur ce sujet ?

Le principe d'exclusion, comme celui d'exploitation de l'autre, est inhérent au capitalisme. Des enfants meurent dans des mines pour que l'on puisse avoir un téléphone portable, ou autres objets inutiles. Voilà pourquoi mon point de vue sur le sujet est "radical" (ce qui signifie "prendre les choses à la racine") et que je souhaite la fin du capitalisme, le plus rapidement possible. Notre Monde actuel est source d'exclusions, de malêtre, il n'y a qu'à voir les chiffres de consommation d'anti-dépresseurs pour s'en rendre compte. Les noyaux familiaux ont explosé, la vie citadine pousse à l'individualisme et à l'isolement... J'oppose à ça un mode de vie plus sobre, plus simple, en communauté, où l'entraide sera essentielle au bonheur individuel et collectif.

8/ Je le demande souvent car, je crois que l’isolement, la solitude, sont une forme de souffrance d’une extrême violence. Vous avez pour vous l’écriture de vos textes pour mettre des mots sur des maux. Quels conseils auriez-vous pour ne pas sombrer davantage et tenter de mieux vivre avec sa différence ?

Déjà, cesser de parler de "différence", qui induit qu'il y a une norme, et préférer parler de "singularité". Ensuite, si j'ai un seul conseil à donner aux personnes en souffrance, c'est de ne pas suivre les recommandations medicales, qui sont le fruit d'une medecine occidentale régie par des multinationales appelées "laboratoires pharmaceutiques". Il en va de même pour les recommandations "sociales". Donc, vivez, plantez-vous (c'est en se plantant qu'on finit par pousser), écoutez votre coeur, inventez vos propres règles. Ne demandez pas votre chemin, trompez-vous (c'est là que se cache le bonheur, il me semble).

9/ Enfin, quels messages voulez-vous faire passer à travers vos chansons ? Quels en sont les destinataires ?
Les destinataires sont celles et ceux qui veulent bien écouter mes chansons. Et tous les êtres humains vivants sur cette planète.
Quand au message, c'est un message d'urgence absolue. Nous vivons actuellement la sixième extinction de masse, et le capitalisme est parti pour tout détruire, jusqu'au dernier arbre, jusqu'au dernier oiseau, jusqu'au dernier poisson. Nous n'avons d'autres choix que d'entrer en résistance face à l'écocide en cours. Les actions individuelles ne suffisent pas. Plus nous serons nombreux, et plus nous aurons une chance de sauver ce qui peut encore l'être. Nous nous devons d'agir.... Maintenant.

Manuela SEGUINOT

vendredi 6 septembre 2019

Une rentrée presque inclusive…




1/ Vos vidéos des derniers jours sont criantes et effrayantes à la fois. Elles sont le reflet d’une réalité qui perdure depuis hélas, très/ trop longtemps. Quel est votre ressenti face à cette rentrée 2019 : inclusive ou pas ?

Eh mince, moi qui espérais qu’elles soient drôles ! Celle sur le loto des AVS a tout juste un an mais comme les choses semblent en effet évoluer trop lentement, elle reste toujours d’actualité. Hélas. Je crains de devoir encore la repartager l’an prochain … vu que Monsieur Blanquer nous a annoncé une rentrée 100% inclusive pour 2022, si j’ai bonne mémoire. C’est à la fois périlleux et terriblement intelligent, il ne sera alors probablement plus ministre et aura pu refiler la patate chaude à son successeur ! Pas bête Jean-Mich’ ! Donc, 3 ans avant le relais annoncé, on a bien sûr une école plus inclusive qu’il y a 10 ans mais avec une inclusion à la carte, comme d’habitude, sauf que ce sont rarement les familles qui peuvent choisir le menu.


2/ On nous avait promis une rentrée permettant une scolarisation de tous les enfants porteurs de handicap, visiblement vous avez des chiffres 😉 ? Allez, j’ose, Fake ou pas ?

J’attends les vrais chiffres, comme tout le monde. Au delà des chiffres, sur les réseaux sociaux, je ne compte plus les familles sans solution, les enfants exclus du système éducatif. Il suffit de lire les commentaires sous mes vidéos, la situation n’est pas si rose. Pour ce qui concerne la Drôme, la Ministre semble donc contester les 240 enfants sans solution, chiffre avancé par l’ami Jean-Luc. Ce mercredi matin, Sophie a ainsi avancé que sur ces 240, 141 enfants étaient scolarisés. Étrange. Mais peut-être vrai. Surtout, je serais curieux de connaître leur nombre d’heures hebdo à l’école. Idem, avec ou sans AESH ? Et si AESH, tou(te)s en poste ? La ministre a t-elle fait appeler chacune des familles pour savoir ce qu’il en est vraiment. On a aussi appris ce matin que 75 élèves étaient inconnus des services. Car pas inscrits à la MDPH. Quand on sait le temps qu’il faut pour avoir un diagnostic d’autisme par exemple, on comprend facilement que beaucoup de ces enfants sont en attente de diag. Donc je compte sur Sophie et Jean-Mich’ pour nous envoyer un petit tableau Excel avec les enfants à plein temps, ceux qui n’ont qu’une heure par semaine et ceux qui toquent à la porte, ce serait cool. Pas que pour la Drôme ou la Lozère, bien sûr. (lien vidéo : https://www.facebook.com/laurent.savard.officiel/videos/10157731270592454/UzpfSTc1NTkxMjQ1MzozMDYwNjExMjk0OTk0MTQ6MTA6MDoxNTY5OTEzMTk5OjM3NTYxOTk3MDg1Nzc5MDIyNTY/?__tn__=%2CdC-R-R&eid=ARCAdRCSsfhFKHDe2iSDpFHRuKE5QlkzYiNVyE3BCQIIDtkDkXXrOZgKdEctHgUfUDXBtoedi9rTyh_T&hc_ref=ARQOHECSZ4Br3HeYV_9jeR4Q8lU9XaxXkFzuyPZThc68ueXkZ9YwXcNHeymWqABhZCI&fref=nf

3/ De PLUS, autre problème, les AESH. Quel regard portez-vus sur les nombreux dysfonctionnements qui en découlent ?

Les pauvres. Dans les deux sens du terme. Pas assez formé(e)s, sous-payé(e)s. Les AESH ont un mérite énorme. Tout d’abord car le métier peut être sport mais aussi parce qu’avec la fameuse mutualisation, on risque de les décourager du job. D’autant plus pour les surdiplômé(e)s et j’en connais beaucoup. À mon humble avis, il faudrait qu’elles soient spécialisées pour un type de handicap et même pour l’autisme - allez savoir pourquoi, j’aime bien cet exemple - accompagner un enfant avec un profil très sévère, ce n’est pas la même chose qu’épauler un enfant autiste Asperger. Surtout, quand on sait que beaucoup d’AESH n’ont pas un temps plein, il faudra me dire comment on peut s’en sortir avec 700€ par mois.

4/ J’ai une pensée émue pour tous les enfants qui n’ont pas accès à l’école cette année encore (Bisous à Kévin…), mais aussi pour leur famille. Selon-vous, que faudrait-il faire pour qu’il y ait une avancée rapide et concrète ?

Que je sois ministre ! (rires) … ou revenir au septennat, pour que le fond l’emporte davantage sur la comm’ chez nos amis ministres. Très sincèrement, comme Jean-Mich’ ou Sophie, je n’ai pas la baguette magique et j’imagine leurs impossibles équations à résoudre. Entre les contraintes budgétaires, l’inertie de l’Éducation Nationale et un accroissement des demandes d’accompagnement, j’ai peur qu’à terme, on favorise l’accompagnement des enfants les plus « gérables » aux dépens de ceux présentant un handicap plus lourd. À terme, c’est la loi de 2005 qui pourrait être remise en question. À défaut d’une avancée rapide, on peut donc redouter un vif recul.

5/ Nombreuses sont les interventions qui font froid dans le dos (J.M Blanquer, Sophie Cluzel…) pour la rentrée. Même si des choses ont été faites, n’essaye t-on pas de nous endormir avec de belles promesses ?

Ça, c’est le job de tout politique ! Ne soyons pas dupes, quels que soient les gouvernements, ce sera la pression constante des parents d’enfants handicapés, des associations, etc… qui permettra des avancées. Je remercie d’ailleurs Madame Cluzel d’avoir fait passer le droit de vote pour TOUTES les personnes handicapées. Je dis même, bravo Sophie ! Quand on sait comment certaines personnes dites normales peuvent voter … 1 ÊTRE HUMAIN = 1 CITOYEN, tout simplement.

6/ Le loto des AESH, j’adhère complètement à l’idée, tout comme celui des Sans Domicile Fixe mais, concrètement, quelles mesures budgétaires devraient être prises pour subvenir aux besoins humains permettant l’accueil de tous les enfants ? (Essayons de donner des idées 😉 …)

Ce qui me chagrine, c’est que le sujet du handicap ne soit pas rendu plus « sexy », c’est un sujet majeur au même titre que le réchauffement climatique, par exemple. On préfère s’indigner de la maltraitance animale, à juste titre, mais les médias « tendance » ne parlent jamais du sort des enfants handicapés, et encore moins des adultes. Il suffit d’écouter Nova en boucle pour s’en rendre compte. Au mieux, on nous vend de l’inclusion « paillettes ». En télé d’autant plus. Donc j’attends que Stéphane Bern – ou un(e) autre - nous vende un loto des AESH ou, plus largement, un loto du handicap ! Je préfère me limiter à cette seule idée avec le fol espoir qu’elle puisse aboutir … Stéphane, HELP !


7/ Vous nous annonciez une belle rentrée pour Gabin qui a fêté récemment ses 17 printemps, comment va-t-il ?

Il va furieusement bien. À l’aube de ses 18 ans, il devrait participer aux 24H Rollers du MANS. Un projet tout sauf paillettes, même si Gabin brille à rollers. Un projet sportif. Avec des partenaires comme Animate – la figurine - qui a sorti des superbes coffrets autour du sport dont 10% seront au profit du projet. Tous les supporters sont les bienvenus, impatient de voir Gabin faire la course !

8/ Comment s’annonce votre rentrée ? Des projets ? Des représentations parisiennes ?

Active, on fêtera les 10 ans du « bal des pompiers » cette saison. C’est fou ! Le spectacle n’en finit pas d’évoluer car Gabin n’a pas fini de grandir. Avec des programmateurs toujours aussi variés, villes, festivals, assos, et même médiathèques depuis la sortie du bouquin ! Avec « Gabin sans limites », certains se sont rendu compte qu’il y avait aussi un spectacle … et on me demande réciproquement de jouer le spectacle pour signer ensuite le livre. Le prix Baudelot attribué cette année – comme a pu l’avoir Grand Corps Malade avec « Patients » - participe aussi à cette actualité.
Pour résumer, je suis toujours en mouvement, la majeure partie de mon temps derrière Gabin à rollers - le suivant péniblement à patinette – et le reste du temps, sur scène ou en conférence. J’adore aussi ce dernier format, finalement très « stand-up », ce qui me permet de m’adapter à l’actualité toujours remuante du handicap et de l’autisme.
Donc je vais encore voyager cette année et cela commencera par Figeac début octobre. Pas de retour prévu à Paris pour l’instant mais je jouerai à Bry/Marne fin novembre. Toutes les dates sont annoncées sur laurentsavard.com.
J’ai aussi d’autres projets comme une collaboration avec l’ami Peter Patfawl et la suite de « Gabin sans limites ». À moyen terme, je projette également de créer un nouveau one-man-show, en parallèle du bal des pompiers que je jouerai jusqu’au dernier souffle.
Cet autre seul en scène devrait parler de tous les sujets de société, dont le handicap, bien sûr.
Cela transparait déjà dans mes vidéos, j’aime faire rire sur tous les sujets. J’aime faire rire tout court.
Mais toujours sur des sujets sérieux, c’est plus drôle.

Manuela SEGUINOT