dimanche 24 février 2019

De la menstruation à la masturbation : Mon corps se transforme …






Je travaille depuis de longues années auprès d’enfants extra-ordinaires. Force est de constater que la période d’adolescence, de pré-adolescence est très difficile pour eux. Pourquoi ?

D’abord parce qu’ils ne sont pas suffisamment accompagnés dans cette période de modification de leur corps. Des changements importants interviennent tels que la menstruation* pour les jeunes filles. Cette étape de leur vie est un cataclysme qu’il ne faut pas négliger. Ce n’est pas parce qu’ils sont en situation de handicap qu’ils ne doivent pas être accompagner. Il y a d’abord l’apparition de saignements qui peut être vécut très violemment et associé à quelque chose d’effrayant. Puis, la douleur due à la menstruation. Elle est nouvelle, inconnue et elles n’ont pas de repères auxquels s’accrocher pour se rassurer.

J’ai l’amer sentiment que ces périodes de menstruations sont un calvaire pour les accompagnants peu ou pas formés pour expliquer à ces femmes en devenir les motifs de transformation de leur corps. Par exemple : aider à changer de protection périodique est une intrusion à l’intimité. Deux options possibles :

-          L’aspect récurrent laisse poindre les automatismes de l’accompagnement sans réaction supplémentaire de la jeune femme

-          Intrusion intime vécut de manière très violente

Là encore le discours pourrait être qu’il n’y a pas le choix de créer ces automatismes. Je ne suis pas d’accord. Nombreux sont les professionnels de santé qui évoquent ces périodes comme des agressions physiques destructrices. On doit mettre en place des spécificités d’accompagnements qui permettraient à ces jeunes femmes de comprendre l’importance des gestes répétitifs pour des raisons d’hygiène et de bien-être.

Certes, il y a des exceptions à la règle mais ces jeunes femmes ont le droit de comprendre les modifications de leur corps. Cela pourrait ainsi leur permettre de mieux vivre ces périodes délicates mais aussi poser des questions sans filtre. Bref, l’accompagnement et la formation des professionnels dans ce cas précis est indispensable.

Autre point important concernant aussi les garçons que les filles : l’Amour et la sexualité. Sujet délicat, presque tabou qui s’accentue à l’adolescence. Après les changements d’un corps qui évolue pour devenir celui d’un homme ou d’une femme, il y a l’apparition de nouveaux sentiments, de nouvelles envies, de nouveaux besoins...

Grand tabou de notre société, la masturbation*. En effet, ces jeunes en construction se retrouvent à découvrir cette pratique dont on parle très peu alors qu’elle concerne une très large majorité des adultes en devenir. C’est une manière de voir apparaître la sensation de désir, de plaisir procurer par cette méthode.

Une fois de plus, ce n’est pas parce que ce sont des enfants porteurs de handicap qu’ils ne sont pas concernés. Ils ont en eux tout un tas de besoins et de désir qui se réveillent. L’orientation sexuelle en fait également partie mais avec la particularité de n’avoir aucun filtre. Ils sont entiers, vivent et ressentent les choses intensément.

Ce qui me chagrine, c’est que là encore professionnels et enfants se retrouvent à devoir vivre ces situations malgré eux. Pour les professionnels souvent gênés et démunis face à ces pratiques qui « dérangent », beaucoup ferment les yeux car ils ne savent pas quel positionnement avoir et pour les « jeunes », ils ne bénéficient pas de l’intimité dont ils auraient besoin pour répondre à cette sollicitation spécifique de leur corps. La question de l’acceptation, de l’accompagnement et du respect de l’intimité devrait être très rapidement pris en considération.

On ne peut ignorer les difficultés auxquelles sont confrontés les professionnels concernant la sexualité. C’est un sujet vaste et varié nécessitant d’être formé pour mieux accompagner ces futurs adultes.

Arrêtons ce tabou sociétal qui ne fait que discriminer ces enfants porteurs de handicap. Nous nous devons d’être présent et de répondre aux questions qu’ils se posent mais devons- nous accepter qu’ils s’embrassent ? Devons-nous prôner la « normalité » des couples : hommes/femmes ? Quelle place devons-nous laisser à la sexualité ? Quel discours devons-nous tenir ?

Cette sensation d’être formatée ne me convient pas. Pourquoi ces jeunes en situation de handicap devraient répondre à des critères très précis alors que nous sommes dans une société où la liberté fait partie des fondamentaux de notre Pays ?

Manuela SEGUINOT

*Menstruation (ou règles) : désigne un écoulement sanguin périodique évacué par le vagin, saignement qui est une manifestation visible du cycle menstruel des femmes en âge de procréer.

*Masturbation : La masturbation est une pratique sexuelle, consistant à provoquer le plaisir sexuel par la stimulation des parties génitales ou d’autres zones érogènes, généralement à l’aide des mains, ou parfois d’objets tels des godemichets ou autres jouets sexuels

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