Je découvre avec beaucoup d’émotions
le documentaire de Stanislas et Edouard Zambeaux : « Un jour ça ira ».
On nous ouvre les portes d’un
centre d’hébergement d’urgence Parisien l’Archipel, géré par l’Association
Aurore, où sont logés familles et enfants en grande précarité. Certes, l’accueil
de ces familles avec enfants est une action louable mais ce n’est pas
suffisant.
Nous faisons la rencontre de
plusieurs enfants, garçons et filles, scolarisés qui se livrent bien volontiers
sur leur quotidien et leur ressenti. Ils sont nombreux à ne pas avouer à leurs
camarades de classe qu’ils vivent dans un centre d’hébergement d’urgence, par
honte et crainte d’être jugés.
Pourtant, ils font preuve de
maturité, ils ont conscience des difficultés de la vie : travail,
ressources, logement… Ils se contentent de ce qu’ils ont sans jamais rechigner.
Ils s’entraident les uns les autres, les plus grands s’occupent des plus
petits. Ils ont pour discours que c’est une grande et belle famille. Je suis
profondément touchée par cette solidarité permanente de tous les résidents du
centre.
On rencontre brièvement des « responsables »
du centre qui accompagnent les résidents dans leur quotidien pour tout ce qui
est social, administratif, éducatif… Une main tendue en plus de l’hébergement.
Une écoute offerte aussi qui me semble indispensable pour avancer. Chacun des
résidents garde le secret espoir d’obtenir un jour un logement pérenne et une
situation stable.
Il y a toutes sortes de
résidents, il y a deux enfants porteurs de handicap qui m’ont affecté et qui
pourtant, semblaient heureux. Une petite fille porteuse de trisomie 21, sa
maman explique toute sa difficulté à soigner son enfant. La solitude aussi est
lourde de conséquence moralement. Le deuxième enfant est un petit garçon
atteint d’une déformation du visage. Il vit avec ce handicap naturellement,
sans jamais l’évoquer. Il est plein de vie, joyeux, solaire, quel courage !!
Il est difficile de mettre des
mots sur cette précarité pour les enfants du centre. On ressent tous les
questionnements qu’ils peuvent avoir en eux. Principalement, la question de
leur origine les anime. On a l’exemple de ce jeune garçon Djibi et d’une jeune
fille Ange, tous deux âgés de 13 ans au moment du tournage. Ils se posent
beaucoup de questions. Ils connaissent leur parcours mais on sent qu’il y a des
pièces manquantes au puzzle. La construction de l’identité est une étape
cruciale de la vie d’un enfant.
Je retiens des mots poignant de
Djibi : « Je suis un sérial déménageur », « Je transporte
ma vie en valise, j’ai appris à voyager léger ». Cela ne devrait pas
exister pour un jeune garçon de 13 ans d’avoir ce discours. Il parle de sa
maman avec fierté et beaucoup d’amour. On sent la sincérité et tout l’espoir qu’il
fonde pour un avenir meilleur.
Ange est une jeune fille timide
mais qui interprète la chanson « Les Invisibles » avec beaucoup de
conviction. Les larmes qui coulent sur son visage lors du concert de la fermeture
du centre en disent long sur ce qu’elle ressent. Sa prestation est émouvante et
tellement naturelle, sans filtre.
Il y a aussi Peggy Rolland,
auteur, compositeur, animant un atelier de chant avec les enfants du centre. Un
projet musique a vu le jour avec la réalisation d’un album « Invisibles »
disponible sur Deezer. Les textes sont le reflet de leur vie avec tout ce qu’ils
éprouvent. Des déclarations d’amour faites aux parents avec une reconnaissance
incroyable. Les mots choisis sont des mots d’enfants qui résonnent encore plus fort
et donnent un sens plus profond à cette précarité.
Je ne peux rester sans partager
la découverte de ce documentaire exceptionnel mais aussi de cet album qui
résulte de ce grand projet. La précarité et la souffrance est à notre porte, on
ne peut l’ignorer.
J’ai moi-même été dans une situation de grande précarité
sans l’avoir choisi. J’ai été aidé par une association et je n’ai pas honte de
le dire. J’ai eu la chance de vite rebondir mais j’ai conscience que ce n’est
pas toujours le cas. 10 ans après cette période difficile de ma vie, je me
rends dès que possible au sein de cette association « Cœur de Femmes »
qui est une famille pour moi.
Mon affection aussi pour tous ces
enfants à qui je voudrais venir en aide… Chacune de leur intervention m’a émue
aux larmes. Leur force et leur courage est admirable. J’ai peu de mots pour les
décrire si ce n’est qu’ils sont incroyables et qu’il ne faut pas qu’ils soient
Invisibles.
Il y a encore beaucoup de choses
à faire pour améliorer la prise en charge de toutes ces familles en grande précarité.
Le sujet du logement et de l’inclusion est défaillant. Il ne faut pas l’attribuer
uniquement aux personnes en situation de handicap. Il y a aussi toutes ces
personnes que l'on voit tout au long de ce documentaire. Ils sont l’exemple
concret qu’il y a beaucoup d’autres populations concernées par la précarité, le
mal-logement, l’exclusion social, l'éducation, l’accès aux soins…
Manuela SEGUINOT
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