vendredi 18 janvier 2019

Aide Sociale à l’Enfance, un système rempli de défaillances





Je découvre avec écœurement et colère le reportage « Les enfants placés de la République ». Je suis une mère de famille et professionnelle exerçant auprès d’enfants de tout âge depuis de nombreuses années, avec la spécificité du handicap. 

J’étais déjà spectatrice des dysfonctionnements de notre société vis-à-vis des enfants porteurs de handicap ne bénéficiant pas de prise en charge optimale : manque d’AVS, personnel non formé, retard du système éducatif, enseignants à bout… 

J’ai voulu dénoncer une fois de plus les difficultés d’inclusion dans notre société. Même si je l’imaginais, j’étais très loin de l’ampleur des dégâts dans les structures d’accueils pour enfants placés.

Le système de l’aide Sociale à l’Enfance est horrible et destructeur. Je l’ai souvent dit à travers mes articles, nous ne voyons pas ce qu’ils se passent derrière les portes d’établissements accueillants des enfants en difficultés. Les familles ne peuvent que subirent tant que des faits ne leurs sont pas concrètement évoqués.

1/3 : Premier cas : les foyers :

Le reportage démontre là encore de nombreuses problématiques. A commencer par le recrutement. Un journaliste, non diplômé, sans aucune expérience et ayant envoyé un CV erroné a été recruté en une semaine. De plus, aucun contrôle du casier judiciaire !! C’est inacceptable et tellement préjudiciable pour les enfants accueillis. On l’a laissé partir seul, à 2 reprises, avec des enfants et en voiture. Sans cette infiltration au sein de ce foyer, impossible de prouver de tels agissements.

Autre ignominie des foyers : la violence verbale et physique. On peut voir à quel point le quotidien n’est qu’insultes et violence. Violence de la part des enfants mais aussi de la part des éducateurs. 

Colère et larmes me sont très vite montées lorsque j’ai visionné la scène d’un éducateur étouffant et frappant un jeune avec un oreiller à la suite d’une bataille de coussins qui tourne mal. C’est d’une violence insoutenable. L’éducateur en question le menace sans aucune crainte. Il explique ensuite à son collègue comment frapper sans qu’il n’y ait de traces sur les enfants (avec le coude…).

Ces agissements et images ont été transmise à la direction. Cette femme fut choquée mais prétend être démunie face à de telles situations. Qu’elle n’a que peu de moyens pour intervenir. Que tout cela n’est pas visible. Elle indique que des poursuites et mesures vont pouvoir être prises grâce aux images. Malgré tout, les faits se sont produits et l’agresseur a pu continuer quelques jours durant d’exercer dans le groupe où se trouve l’enfant qu’il a violenté. C’est honteux et humiliant pour ce garçon qui est victime de coup porté par un professionnel.

Sont évoqués aussi, les abus sexuels et viols entre enfants. Une éducatrice nous raconte le cas d’une fillette de 4 ans faisant une fellation à un garçon de 10 ans. Cela me répugne au plus haut point. Elle ajoute que souvent victimes et agresseurs restent des mois durant dans la même structure, dans le même groupe et qu’il n’y a pas de suite.

Pour autant, les éducateurs indiquent que la direction ne peut ignorer toutes ces agressions. Une note d’incident est répertoriée à chaque fois avec le nom de la personne qui l’établie. Selon eux, la direction est inactive. 

Les agresseurs ne sont pas poursuivis et surtout pas soignés. Une éducatrice tient des propos qui resteront gravés longtemps dans ma mémoire : « On fabrique les délinquants et prédateurs sexuels de demain ». On ne peut ignorer de telles paroles. Faire la sourde oreille serait trop facile. Tout comme ne pas partager son ressenti après avoir regardé ce reportage.

Je n’avais jamais entendu parler de Lyès Louffock. Jeune home de 24 ans, enfant placé dès l’âge de 6 ans, désormais membre du conseil National Protection de l’Enfance. Il fait brièvement le récit de son parcours. Il est l’auteur d’un livre : « Dans l’enfer des foyers ». Ce jeune homme est l’exemple même d’exceptions à la règle.

Fort de son expérience, il s’engage humainement auprès de jeunes en grande souffrance. Il répond présent aux sollicitations qui lui sont faites. Selon Lyès, dans chaque département, au moins un foyer dysfonctionne. Mais aussi, que la maltraitance et les viols y sont « monnaies courantes ». Constatation accablante et déroutante lorsque l’on parle d’établissements de l’Aide Sociale à l’Enfance.

Je découvre cet homme avec beaucoup de plaisir. Ses actions, son combat auprès des enfants sont la preuve que tous ne sont pas dupes face aux dysfonctionnements de notre société.

Les répercussions peuvent être dramatiques et destructrices sur le long terme. Il ne faut pas rester silencieux si nous voulons que les choses évoluent et ne plus être que de simples spectateurs. 

Je suis admirative du parcours de Lyès et très reconnaissante car grâce au récit de son enfance douloureuse, il offre à beaucoup d’autres jeunes une lueur d’espoir dans ce tableau si sombre.

Manuela SEGUINOT

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