mercredi 1 avril 2020

Malgré le confinement, n’oublions pas la Journée mondiale de l’autisme



Gabin à rollers ...

1/ Cher Laurent, tout d’abord, comment allez-vous et comment se porte Gabin ?

J’ai la chance d’avoir une nature optimiste et je pense que ça me rend plutôt service en ces temps difficiles. Même si j’ai au début mal vécu que toute ma tournée se retrouve reportée, j’ai aussi une palette de livres – « Gabin sans limites » que je signe après mon spectacle - qui vont végéter dans ma chambre jusqu’en septembre … mais ce serait indécent d’être plaintif actuellement.

Gabin va mieux. Au début il n’était pas dans son assiette non plus. Il a même pleuré, ce qui est rare chez lui. Il se remettait à peine de l’extraction de ses quatre dents de sagesse. Depuis il a retrouvé le sourire.

2/ Le confinement qui nous est imposé n’a rien d’évident, beaucoup de parents d’enfants porteurs de handicap souffrent de la situation. Comment vivez-vous cette période ?

En fait, du fait de l’opération de ses dents de sagesse, notre confinement a finalement débuté dès fin février. 

Quand au lendemain de l’allocution d’Emmanuel Macron du 12 mars, on a appris de l’IME - où il se rend à mi-temps – qu’il était préférable que Gabin ne vienne pas, tandis que tous les organisateurs de spectacle m’appelaient pour reporter mes dates de représentation, on a pris de suite la route de la Bretagne où on aime se confiner au moindre week-end ou en vacances, bien sûr.

On a la chance d’y avoir une petite maison … et j’ai du sang breton !

3/ Nombreuses sont les familles à bout de souffle après 3 semaines au domicile. Comment Gabin vit-il cette situation ? Les autorisations d’une heure de sortie vous semblent elle suffisantes ?

Quand on connaît Gabin et son besoin de se dépenser – son autisme est conjugué à une hyperactivité puissance 10 – une heure, c’est forcément court.

Du coup on fait un parcours très sport, à rollers, of course ! N’oublions pas qu’il prépare les 24H Rollers du Mans avec son team « Gabin sans limites » ! (épreuve sans doute reportée en juin)

4/ Selon-vous, les familles et enfants sont-elles laissées pour compte dans cette lutte contre le virus ? Y a-t-il des choses qui devraient être mis en place rapidement ?

Honnêtement, je pense que la priorité c’est de respecter ce confinement, ce virus semble être une belle saloperie. 

Après, bien sûr, pour beaucoup de familles, c’est galère, galère … mais peut-être que les parents d’enfants, ados … porteurs de handicap(s) sont les mieux préparés, nous sommes habitués à être sans solutions … donc on les trouve, on les bricole, on sait faire, finalement.

5/ Comment jugez-vous l’accompagnement ou le suivi des enfants qui, habituellement, sont en institution / écoles … ? Avez-vous le sentiment pour Gabin, d’être accompagné ? écouté ? conseillé ?

On a plusieurs coups de fil par semaine, ça permet surtout de préparer au mieux l’après. Mais de toute façon la prise en charge de Gabin repose pas mal sur le sport, l’activité physique et le rollers … il y a donc continuité. Par contre, un confinement sans possibilité de sortie, ce serait l’horreur ou disons, très dur.

6/ Le 2 Avril est la journée Mondiale de l’Autisme. On a pu voir au sein de votre vidéo votre mécontentement face aux discours de D.Trump, quel est votre ressenti face à de tels propos ?

Ce n’est pas le propos de Trump, je me suis amusé à l’imiter pour qu’il engueule justement les gouverneurs d’Alabama, Arizona, etc… qui ont pris cette décision de ne pas placer comme prioritaires les enfants, personnes trisomiques, autistes avec déficience intellectuelle, … hélas, un peu partout dans le monde, j’ai bien peur que ce tri dégueulasse se fasse … car des respirateurs il n’y en a hélas pas pour tout le monde. 

Les choses sont donc claires, les personnes handicapées sont des sous-hommes pour certains décideurs, on revit ici les pires heures de l’Histoire … et l’histoire n’est pas finie …

7/ Bien évidemment, tous en BLEU en cette journée Mondiale de l’Autisme. Quel message aimeriez-vous faire passer pour les familles et enfants en souffrance aujourd’hui ?

Qu’il n’y a pas de souffrance à avoir justement. Vivre au mieux, le mieux possible … et ne pas perdre son appétit, son humour … son appétit de vivre ! Et que mon cœur se revêt de bleu pour les soutenir !

8/ Enfin, pour ceux qui ignorent ce qu’est le handicap et plus particulièrement l’autisme, que pourriez-vous leur dire pour que les esprits s’ouvrent davantage à TOUS ceux qui les entourent ?

D’ajouter un S à autisme. L’autisme est très … pluriel ! Certaines personnes ont un QI au dessus de la moyenne avec des difficultés de socialisation. Mais c’est hélas une minorité.

D’autres ont une déficience intellectuelle – le mot n’est pas cool mais c’est une réalité pour un bon tiers des personnes autistes – et/ou ne parlent pas, ne savent pas lire, ont des gros problèmes de comportements. 

Beaucoup peuvent aussi partir dans des crises pas toujours faciles à gérer et ce dans tout le fameux spectre. Personne ne peut donc résumer l’autisme, pardon, les autismes. 

D’ailleurs, dommage que Gabin ne puisse parler, il pourrait lui-même définir son autisme qui est à dix mille bornes de l’autisme d’un Good Doctor ou même de Rain Man.  

Donc, pour s’ouvrir à l’autisme, il faut s’ouvrir à la différence, toutes les différences !

Propos reccueillis par Manuela SEGUINOT